L’épidémie a porté un coup dévastateur au monde de la nuit. Les événements festifs sont interdits, aussi bien dans les clubs qu’en extérieur. En l’absence de lieux de fête, les rave party illégales se sont peu à peu emparées des silencieuses nuits parisiennes.
« On ne va pas se taire. » – c’est ce que nous a confié le collectif parisien Feel Free Records(FFR) dans le cadre d’une interview. Ils ont choisi d’organiser une soirée en plein confinement, le samedi 31 octobre. L’été 2020 a été témoin d ’une certaine « rébellion » face aux mesures restrictives de l’Etat – largement manifestée dans le cadre des nombreuses raves party illégales, le plus souvent sous la forme « d ’open air ». Cette dynamique s’est poursuivie dès la rentrée, avec des raves illégales organisées autour de Paris – à la Courneuve notamment – mais aussi en Bretagne et en Essonne, rassemblant entre 800 et 2000 personnes à chaque fois.
La fête continue malgré tout
Les organisateurs (des collectifs parisiens déjà bien implantés comme Possession, qui se définit comme un « rendez-vous libertaire et libéré, bien décidé à contenter ceux qui aiment fêter la nuit, sans stigmates, sans limites, sans barrière de genre ») mais aussi de plus modestes, s’adaptent et continuent de proposer des événements à leur public. Certains rivalisent d’imagination, comme les instigateurs de la rave party en Essonne récemment. Du bois de Vincennes aux hangars désaffectés des portes de la capitale, tous ces lieux sont investis par une partie de la population désireuse de danser et lâcher prise – parfois non sans conséquences, puisque la gendarmerie est quasi-systématiquement envoyée sur les lieux pour sonner le glas de la soirée et saisir le matériel au passage.
La réponse des autorités : entre répression et dialogue
Ces manifestations clandestines ne plaisent pas à tout le monde, de surcroît lorsque le voisinage est impliqué. Ainsi, la sénatrice LR Pascale Bories a réussi à faire adopter au Sénat une proposition de loi renforçant les sanctions concernant les free parties, au motif du non-respect de la tranquillité des riverains et de la salubrité des lieux. Cette loi a néanmoins peu de chances d’entrer en vigueur, le gouvernement n’y étant pas favorable. Si les forces de l’ordre sont envoyées sur les lieux à chaque manifestation illégale, les interventions se déroulent le plus souvent dans le calme, comme le souligne l ’un des membres du collectif FFR : « Il y a eu quelques dérapages, notamment avec les CRS qui se sont un peu lâchés niveau violence. Mais globalement, on peut dire que l’interpellation s’est déroulée sans accrocs. »
La répression n’est cependant pas l’unique ressort de la mairie de Paris : d’après Frédéric Hocquard – adjoint à la vie nocturne d’Anne Hidalgo – des discussions sont en cours au sujet d’éventuels partenariats visant à créer de nouveaux espaces de fête ouverts, notamment avec la SNCF3. Selon lui, « Il faut être inventif, accompagner les choses, développer de nouvelles formes parce qu’on ne peut pas laisser ça ». Il affirme également : « Notre approche est de trouver un dispositif, avec des endroits autorisés où l’on sait ce qu’il se passe, où les collectifs se déclarent au préalable et où l’on peut faire de la prévention, que ce soit pour les risques habituels (alcool, drogues, MST) et ceux dus à l’épidémie » Une charte entre les organisateurs de free party et les pouvoirs publics est également à l’étude. Les perspectives d’avenir restent donc incertaines pour le monde de la nuit en général, mais suscitent tout de même réflexion et dialogue de la part des acteurs impliqués.
Article rédigé par Olivier Ghezal.