Interview avec Julie Leveau

Julier Leveau est chargée de communication et production pour le collectif Vryche House.

Quel est votre rôle dans l’équipe du festival Vryche ?

Je fais partie du collectif depuis deux ans. Mon rôle consiste à travailler avec des gens qui te font accéder à des choses inconnues, qui te forment, t’initient, une bande de mecs passionnés et ambitieux.

Nous organisons des soirées, une à deux fois tous les trois mois, sous différents formats. Nous avons un format régulier : les basements. Et quelques formats plus divers selon les saisons. Puis bien sûr, nous organisons le festival Vryche sur Yvette. Il y a aussi nos « RP » : relations publiques et relations presse. Ce sont des personnes intéressées par le projet qui nous aident à le faire grandir.

Le mieux dans tout ça, c’est d’être soutenu par un public de fidèles. Le meilleur. Des femmes et des hommes bon esprit, toujours là pour nous supporter, des gens qui savent ce qu’est la fête et qui décident d’amener leur pierre à l’édifice. C’est ce qui nous permet de tenir en ce moment.

Comment avez-vous vécu l’annonce du confinement ?

Le premier confinement a été assez étrange. Comme tout le monde, on ne savait pas ce qui nous tombait sur la tête. Nous pensions qu’il nous serait possible de rouvrir quelques semaines après.

En tant que collectif, c’est compliqué de se positionner sur ce genre d’événement. Nous vivions les nouvelles au même rythme que tout le monde mais recevions sans cesse des messages à propos des ventes sur les prochaines soirées ou le festival.

Nous avons donc construit une communication de crise. Ce qui a été intéressant si on réfléchit au côté purement communicationnel. C’est une nouvelle façon de parler à notre public, avec des communiqués à rédiger et des réactions à anticiper.

Nous avons fait en sorte de réagir comme nous le souhaitions : en essayant de maintenir le bateau à flot. Au début, tout le monde était très proactif. Nous avons organisé des lives, des IGTV (Instagram TV). Puis les gens en ont eu un peu marre de tout ça. C’est pourquoi il est très compliqué de se positionner en tant qu’organisation, nous n’avons pas envie d’embêter les gens, tout en voulant continuer à leur montrer que nous sommes toujours présents et que nous ne lâcherons rien.

Devoir annuler notre festival a été un gros mal de cœur… Tout le monde s’était tant donné. C’était un coup de massue. Pour les organisations, les prestataires, les copains, les familles, et vous en tant que festivaliers ! Plus d’un an de travail. Maintenant nous sommes tous dans le même bateau.

Quelles ont été les conséquences de ces annulations ?

Je suis devenue bénévole au fur et à mesure du temps chez Vryche House. Donc la question du salaire ne s’est pas posée pour moi. Par contre, ces annulations ont influé sur toutes nos vies professionnelles. De près ou de loin, nous et tous ceux qui marchons dans cette direction

: les prestataires, les partenaires, les sponsors, les mairies, les collectivités, les régions … En France, le monde de l’éléctro (clubs et festivals confondus) engrange à lui seuls deux milliards d’euros. Tous métiers confondus. C’est énorme. Pour le festival, rien ne change dans le sens ou nous remboursons les billets pour ceux qui le souhaitent, et avons gardé 80% du Line up pour l’année prochaine.

Dès le commencement de la crise, cela nous a semblé simplement normal de participer comme on le pouvait. Il n’y a pas vraiment eu de débat au sein de l’équipe sur le fait d’offrir gratuitement des entrées pour toutes les personnes travaillant au service de la société..

Au début, personne ne pouvait vraiment rien dire. Nous étions tous dans le même bateau : « culture », bars, restos, événementiel, petits commerces. On ne se voyait pas jeter la pierre à des gens quasiment aussi démunis que nous, même dans un gouvernement. Personne n’était préparé à ça.

Au fur et à mesure, le discours a changé. Il s’est éloigné de plus en plus du « nous » (tous les participants du secteur musical et événementiel ). Des députés ont même rit lorsque l’un d’eux a dit qu’il fallait absolument regarder vers ce secteur en grande perdition – qui représente 2 milliards par an tout de même. Le plus dur a été l’hypocrisie générale. Tout le monde est content de trouver des clubs, des bars, des restaurants quand il faut « décompresser ». La maire de Paris Anne Hidalgo et l’ancien Ministre de la Culture Jacques Lang sont même venus à la fermeture de la célèbre boîte – péniche Concrète.

Nous permettons à notre manière, de développer la culture grâce aux échanges européens sur les scènes électro, les festivals, à l’aide de nouveaux outils. Nous faisons travailler des centaines de milliers de personnes, tous domaines confondus.

A Berlin, tous les clubs ont reçu une aide de l’Etat et sont mis au même statut que certains commerces en difficulté. Nous n’avons reçu aucune aide financière de la part du gouvernement. En France, nous avons le sentiment que les métiers autour de l’organisation de soirées sont dévalorisés.

Ces événements ont-ils changé la perception de votre avenir professionnel ?

A l’époque, je montais mon projet de production. Il est évident que sans concert ou sans manifestation, je n’ai rien à faire dedans. En revanche, cette crise sanitaire nous a tous plus ou moins poussé à monter des “side projects”. Je sors le mien prochainement, un podcast nommé le Vénus Club. Les membres d’Increase the groove, Pont Neuf Records ont quant à eux monté un label. Ces évènements ont donc modifié la perception de notre avenir professionnel en nous forçant à nous réinventer, réfléchir à différents formats de fêtes et modes de communication.

Nous espérons que nous pourrons vous revoir tous au plus vite.

Interview réalisée par Laurène Boussé.