De l’importance de raconter les procès des attentats du 13 Novembre 2015

Lucas DUPUY

Les attentats du 13 novembre 2015, une série de fusillades perpétrées par trois commandos ont fait 131 morts. Le 8 septembre 2021, ce sont les procès du terroriste mais aussi des personnes liées à ces évènements qui se sont ouverts. Le traitement médiatique n’est ici pas seulement attendu, il est nécessaire.

Retour sur une nuit sombre

Les attentats terroristes commis le soir du 13 novembre 2015 à Paris ont fait 131 morts et plus de 400 blessé.es, ce qui en fait l’événement terroriste le plus meurtrier de l’histoire commis sur le sol français. Depuis le 8 septembre et pour une durée de 9 mois au moins, le procès du Bataclan, du Stade de France et des terrasses des 10e et 11e arrondissements s’est ouvert à la cour d’Appel de Paris sur l’île de la Cité. Le parquet national antiterroriste a requis le procès contre vingt personnes suspectées d’être impliquées pour des faits de meurtres, tentatives de meurtres et séquestration, en bande organisée et en relation avec une entreprise terroriste. Les commémorations et processions commencées après les faits ont pris un tournant en 2021. À mesure que la date de commencement approchait, le traitement médiatique des attentats se concentrait sur le déroulement potentiel et les intrigues du procès,

« Un dispositif unique pour un procès historique », titre Libération le 01/09/2021.

Un dispositif exceptionnel

Pensée pour se conformer à la fois aux mesures sanitaires, aux mesures de sécurité et pour répondre adéquatement aux besoins des journalistes, des employés et du public, la salle d’audience a été spécialement conçue à l’intérieur de la salle des petits pas de l’historique palais de justice de Paris. Longue de 45 mètres et large de 15 mètres, elle va accueillir jusqu’à 500 personnes pendant toute la durée du procès. Elle est complètement démontable et amovible afin de ne rien abîmer du bâti existant.

« Attentats du 13 novembre 2015 : les coulisses d’un procès hors norme en photos »,
titre Les Echos Week-End le 03/09/2021.

La nécessité de se rappeler

Du fait de son caractère unique tant au niveau symbolique (les lieux choisis), quantitatif (le nombre de morts et blessé.es ainsi que la masse indénombrable de personnes affectées) qu’historique (les attentats les plus meurtriers de l’histoire française), la couverture médiatique du procès est très importante et les journaux de tous les horizons géographiques et politiques en parlent régulièrement. Il faut rendre compte d’une souffrance qui nous impacte en tant que français et françaises.

« Attentats du 13 novembre 2015 à Paris : la douleur à perpétuité », titre Corse Matin le 23/10/2021.

Le fait de raconter les attentats et les procès associés est un exercice d’autant plus important qu’il est difficile,

« 13-Novembre : Que dire ? Qu’écrire ? Que montrer ? », titre Le Monde le 02/11/2021.

Mais il reste avant tout un devoir de mémoire pour tous.tes les Français.ses présent.es et à venir.

« 13-Novembre : une nouvelle façon d’explorer la mémoire », titre Le Figaro le 22/11/2021.

Le besoin d’écrire pour guérir

Ces procès sont ouverts au public, diffusés en direct dans des salles adjacentes et sur inscription préalable. Ils ont le devoir de partager toutes les informations car il faut décortiquer chaque étapes, chaque aspect et chaque personne impliquée. Les interrogatoires de personnalité des accusés se sont terminés Le 5 novembre, 40 jours d’audience pour reconstituer l’enfance, l’adolescence, la vie de famille et le parcours scolaire.

« Procès du 13-Novembre : enfance épanouie, chemin cabossé, les accusés ont déroulé le fil de leur vie », titre Ouest-France le 05/11/2021.

Pour cette première étape, les vingt accusés se sont succédé à la barre du tribunal. Beaucoup sont restés silencieux, mais malgré cela, il fallait mettre des mots sur chaque personne et des images (les croquis réguliers des dessinateurs dans la salle) pour dresser un portrait compréhensible, ou du moins détaillé, des accusés. De là, on a pu lire de nombreux qualificatifs, Libération parlait de « kamikaze » le 08/12/2021. L’Obs cite un témoin qui utilise le mot « barbare » le 13/01/2022. Les mots les plus marquants ne sont pourtant parfois pas les qualificatifs qui caractérisent directement les terroristes, Le Point, pour son article du 31/09/2021, a choisi : « Salah Abdeslam, histoire d’une déshumanisation ? ». Les procès des attentats du 13 novembre 2015 sont un combat à la fois pour la mémoire, pour la vérité et pour le deuil. Ils sont nécessaires tant au niveau national (collectif) qu’au niveau personnel (individuel). Les journalistes sont donc investis de l’importante mission de raconter ce qui s’est passé et ce qui se passera dans les mois qui viennent.

« Journaliste au procès du 13 Novembre, les plumes face aux plaies », Libération, 29/10/2021.