Touchés de plein fouet par la crise sanitaire, les restaurants ont dû fermer leurs portes et stopper leur activité depuis le 30 octobre 2020. A Biot, Jean-Marc Brothier, propriétaire du restaurant Les Arcades, revient avec nous sur la situation critique des restaurateurs.
Vous attendiez-vous aux nouvelles restrictions qui viennent d’être mises en place ? Selon vous, sont-elles justifiées ?
On n’a pas le choix, on est mis devant le fait accompli. On est dans un endroit où la fréquentation est importante, et encore, on fait juste restaurant. C’est particulier parce que nous travaillons beaucoup avec de la clientèle étrangère. Beaucoup de restaurants en France travaillent avec une clientèle locale à Paris. On a préféré fermer surtout en période hivernale comme en ce moment, parce que 50 à 60% de notre clientèle est étrangère. On a une clientèle locale, mais elle représente très peu. En définitive, ça nous revient moins cher de fermer que de rester ouverts parce qu’on a du personnel à payer.
Jusqu’au 1er janvier, le chômage partiel et les charges sont prises en charge par l’État donc on préfère mettre les gens en chômage partiel. Et comme ça, on n’a pas de frais, on ne gagne pas d’argent, mais on n’en perd pas non plus. Parce que si on restait ouvert, ça nous impacterait beaucoup plus. On perdrait de l’argent.
Normalement le mois d’octobre, c’est un bon mois pour nous, mais là comme il y a eu les conséquences du COVID, les étrangers ne viennent pas en France. On avait des réservations pour l’hôtel et pour le restaurant en octobre mais les gens ont décommandé. C’étaient des gens qui venaient d’Allemagne, de Belgique, de Suisse, d’Italie. On a prévu que ça allait beaucoup nous impacter, donc on a préféré prendre les devants et on a mis les gens au chômage partiel depuis la semaine dernière.
Mais nous, on est un peu particuliers parce qu’on est plutôt un business estival. On travaille toute l’année, mais c’est compliqué si on n’a pas les étrangers qui viennent. Par exemple, pour la Toussaint, tous les gens qui nous avaient réservés pour l’hôtel et le restaurant ont annulé. On a aussi une clientèle locale, mais on préfère fermer. C’est moins coûteux pour nous que de rester ouvert. C’est le paradoxe, ça nous coûte moins cher de ne pas travailler que de travailler. On paie les employés, le gaz, l’électricité, les femmes de chambre. Tout ça revient très cher. Et on n’a pas les clients pour assumer tout ça.
De quelle manière pensez-vous que cela risque d’impacter le milieu de la restauration sur le long terme ?
C’est dramatique, il y a des milliers de restaurants qui vont fermer. Les gens qui ont acheté des restaurants, qui ont fait des travaux, qui ont des crédits à payer parce qu’ils ont emprunté, ils ne vont pas s’en sortir, ils vont être obligés de revendre leur affaire pour essayer de s’en tirer.
Que pensez-vous du fait que ces mesures touchent principalement les restaurateurs ?
Il n’y a pas que les restaurateurs qui sont touchés, le milieu du spectacle, que ce soient les cinémas, les théâtres, c’est terrible aussi. Mais tout ça, ça impacte aussi les restaurateurs. Les congrès, les croisières, ce sont des gens qui vont dans les hôtels et dans les restaurants.
Je suis très mitigé. Je pense que ça peut être justifié, mais je pense aussi que les restaurants ont fait hyper attention à l’hygiène. Donc, je pense que les premiers responsables, ce sont les jeunes. Je pense que ce sont eux qui donnent le COVID aux autres. Ils le propagent parce qu’ils n’ont pratiquement pas de symptômes.
Il faudrait qu’il y ait une prise de conscience collective. Il faut surtout que les jeunes fassent plus attention pour les vieux. Cela étant, ce n’est que mon sentiment. Les restaurateurs sont punis pour quelque chose alors qu’ils font très attention. Il y en a beaucoup qui vont mettre la clé sous la porte.
Comment envisagez-vous la suite ?
On essaye de perdre le moins d’argent possible, de tenir le plus longtemps possible, le temps qu’ils trouvent un vaccin. On est tributaire du vaccin. Tant qu’il n’y en aura pas, ça va durer, le virus va se propager. Si jamais rien ne l’arrête, c’est effrayant. Ça impacte toute la société. Et particulièrement nous, les hôtels restaurants.
Interview réalisée par Valentine Albou.