Relance du nucléaire : où en est la France ?

Jana EL RIFAI 

Lors de son allocution du mardi 9 novembre 2021, Emmanuel Macron a annoncé la relance du nucléaire qu’il justifie par une volonté d’indépendance énergétique de la France, le faible coût de l’énergie nucléaire et la conservation des compétences dans cette filière. Cette décision fait aujourd’hui débat tant les enjeux du nucléaire sont nombreux et touches aux enjeux environnementaux. 

Qu'est-ce que l'énergie nucléaire ? 
L’énergie nucléaire a été découverte par hasard le 1er mars 1896 par Henri Becquerel. Elle est produite à partir d'uranium radioactif, un combustible présent dans le sous-sol de la Terre. Le phénomène de radioactivité se créer lorsque le noyau d’un atome, comme l’uranium, a trop de particules, il devient alors instable et dégage une énergie sous forme de rayonnements. Cette énergie, aussi appelé énergie atomique, se différencie des énergies fossiles et renouvelables, car l’uranium n’est pas une ressource inépuisable et disponible en grande quantité. Dans les centrales thermiques nucléaires, la fission des atomes d'uranium radioactifs dégage une chaleur permettant de produire de l'électricité. Cette énergie est utilisée à des fins civiles mais aussi militaire, comme pour la fabrication de bombes atomiques par exemple. Cette énergie est aujourd’hui une des plus rentables, peu chères à produire en grande quantité.

Nucléaire : une relance annoncée par le gouvernement 

Lors de son allocution, le mardi 9 novembre 2021, le président de la République Emmanuel Macron a annoncé que « pour garantir l’indépendance énergétique de la France, pour garantir l’approvisionnement électrique de notre pays et atteindre nos objectifs, en particulier la neutralité carbone en 2050, nous allons pour la première fois depuis des décennies, relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays et continuer de développer des énergies renouvelables ». Le gouvernement prévoit la construction de nouveaux réacteurs EPR (Réacteur Pressurisé Européen) afin que la France ait la capacité de prendre en charge une majorité de la demande en électricité sur son territoire. Emmanuel Macron ajoute être en faveur du mix énergétique et d’un investissement dans l’énergie nucléaire, qu’il estime nécessaire.

Le gouvernement avance alors trois arguments principaux : l’indépendance énergétique de la France dans les années à venir, le faible coût de l’énergie nucléaire et la conservation des compétences dans une filière d’excellence française. L’État met aussi en avant le fait que la relance du nucléaire pourrait permettre d’atteindre l’objectif de la neutralité carbone d’ici 2050. Cette décision intervient alors que les installations nucléaires actuelles en France sont vieillissantes et plusieursi nous voulons payer notre énergie à des tarifs raisonnables et ne pas dépendre de l’étranger centrales ne seront donc plus en état de fonctionnement d’ici le milieu du siècle. 

Quels sont les enjeux de cette énergie ? 

Cette décision de relance est un sujet au cœur des débats politiques. Le gouvernement n’a pas précisé les grandes lignes de ce projet de relance ainsi que son agenda. Aussi, nous attendons de voir si la prise de mesures pour le développement des énergies renouvelables si attendus peut être compatible avec cette relance du nucléaire. Selon Sandrine Rousseau, présidente du conseil politique et chargé de la stratégie du candidat d’Europe Écologie-Les Verts Yannick Jadot, « Il n’y a aucun EPR qui nous sauvera de la crise. C’est vraiment s’enfermer dans un modèle de développement qui est complètement dépassé et qui nous met en danger ». Yannick Jadot, qui avait exprimé son souhait de sortir du nucléaire « de manière responsable, c’est-à-dire sur quinze ou vingt ans » durant la primaire écologiste, a déclaré sur Twitter que « Emmanuel Macron est décidément l’homme des lobbys. Quoi qu’il en coûte pour les Françaises et les Français, il est l’agent du nucléaire, une électricité deux fois plus chère que celle des ENR ». Ce à quoi Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, a répondu que le « nucléaire, ce n’est pas un lobby, c’est un savoir-faire français. Il estime aussi que « Nous aurons besoin de nouveaux réacteurs nucléaires pour réussir à atteindre la neutralité carbone dans les années qui viennent ». 

Ce débat est d’autant plus important car la relance de l’énergie nucléaire comporte des enjeux sociaux et environnementaux. Pour commencer, la construction de nouveaux réacteurs permettrait la création de plusieurs emplois sur plusieurs années. En effet, les installations nécessaires à la production d’énergie nucléaire ont une durée de vie assez longue, de 40 ans environ. Cependant les coûts nécessaires pour la construction des nouveaux réacteurs sont très importants (entre 46 et 50 milliards d’euros selon une estimation d’EDF) et l’amortissement de ces investissements prendrait de longues années. Cette relance soulève aussi une grande question environnementale débattue depuis longtemps. Bien que les centrales nucléaires n’interviennent pas directement dans le réchauffement climatique et n’émettent pas de CO2 durant la production de l’énergie, les déchets créés sont très difficiles à être traités. On distingue les déchets radioactifs, les déchets thermiques et les déchets chimiques. Lorsque l’uranium est utilisé il en reste une matière non utilisable qui reste cependant radioactive : les déchets radioactifs. Ces déchets, sous forme liquide ou gazeuse, sont envoyés en usine de traitement pour ensuite être stockés ou enterrés en fonction de leurs niveaux de radioactivité. Ces déchets radioactifs sont nocifs pour la santé des populations même après traitement. Les centrales nucléaires peuvent aussi entraîner des répercussions sur la santé en cas d’accident comme celle de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1986 ou encore Fukushima en 2011. 

France et énergie nucléaire, où en sommes-nous ? 

Depuis 1963, le nucléaire se répand en France : au début, avec la construction de neuf réacteurs de première génération (technologie graphite gaz), en 1968 avec la construction de réacteurs de deuxième génération (eau sous pression), puis plus récemment avec la construction d’un EPR troisième génération qui n’a pas été finalisée. Actuellement, pour la production de son électricité, la France compte 56 réacteurs nucléaires de niveaux de différentes puissances réparties sur 18 sites et géré par EDF. La France est le pays dont l’électricité provient en majorité d’énergie nucléaire, et détient le parc de réacteurs le plus important au monde proportionnellement à sa population. C’est aussi la première énergie utilisée en France pour produire de l’électricité. En effet, selon la Société Française d’Énergie Nucléaire, l’énergie nucléaire représente aujourd’hui 77%, de l’électricité consommée en France, contre 25% d’énergies renouvelables. Ce qui représente chaque année 405 TWh d’énergie nucléaire produite en France. 

« Pour garantir l’indépendance énergétique de la France, pour garantir l’approvisionnement électrique de notre pays et atteindre nos objectifs, en particulier la neutralité carbone en 2050, nous allons pour la première fois depuis des décennies, relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays et continuer de développer des énergies renouvelables », Emmanuel Macron. 

Bien que les centrales nucléaires n’interviennent pas directement dans le réchauffement climatique et n’émettent pas de CO2 durant la production de l’énergie, les déchets créés sont très difficiles à être traités. De plus, les ressources en uranium sont limitées. Au rythme actuel de consommation, il y a assez d’uranium pour une consommation pendant 1 siècle, donc il apparaît que l’énergie nucléaire n’est pas une source d’énergie durable dans le temps. Aussi, la France importe en majorité l’uranium nécessaire à la production d’énergie depuis le Niger et le Kazakhstan, ce qui laisse penser qu’une réelle indépendance énergétique de la France n’est pas possible. En effet, selon la Société Française d’Énergie Nucléaire, l’énergie nucléaire représente aujourd’hui 77%, de l’électricité consommée en France, contre 25% d’énergies renouvelables.