PAR LUCAS BRUN
Le 3 Septembre dernier, 15 000 spectateurs se sont déplacés à l’Accor Arena pour assister au premier événement UFC en France. Ce fut une grande réussite, les 5 français présents sur l’affiche en sont sortis vainqueurs et les résultats économiques parlent d’eux même : 33 millions d’euros de bénéfice et 400 emplois créés pour l’occasion.
Dernier pays européen à avoir autorisé la pratique du MMA sur son sol, la France est désormais l’un des pays montants de ce sport longtemps décrié, à la fois par les autorités et une partie de l’opinion publique française. De l’interdiction à sport de combat numéro le plus populaire, nous allons retracer le parcours du MMA en France. Tout d’abord, qu’est-ce que le MMA ? Ce sport étant peu connu et rempli de stéréotypes, il est important d’en donner une définition claire. Le Mix Martial Arts, anciennement appelé free-fight, est un sport de combat mêlant les différentes boxes avec la lutte ainsi que le jiu-jitsu.
Ce qui le différencie de ses semblables sont que les coups au sol sont autorisés. Ces combats sont régis par un ensemble d’interdits semblables aux différents sports de combat : coups derrière la tête, doigts dans les yeux, morsure, coups de coude verticaux ou encore coups dans les parties intimes. Au total ce sont environ 31 règles, selon les organisations, auxquelles les combattants doivent se soumettre.
Si ce sport était interdit jusqu’en janvier 2020, c’est pour deux raisons principales. La première raison concerne les clichés véhiculés par la discipline. Beaucoup perçoivent le MMA comme du combat où tous les coups sont permis et ne savent pas que les réglementations sont strictes et évoluent avec leur temps.
Au départ, il n’y avait pas de catégories de poids, et certains coups choquants étaient autorisés, comme les coups de pied ou de genoux au visage sur un adversaire au sol. La deuxième raison étant le lobbying des autres disciplines comme le Judo ou la Boxe, très populaires en France et dont les fédérations redoute que leurs adhérents se détournent de leur sport pour le MMA. Jean-Luc Rougé, ancien président de la Fédération Française de Judo avait même déclaré : « Le MMA est un refuge pour djihadiste ». Les autorités avaient elles-même avancé que « la violence et les actes barbares et sauvages commis au nom du sport sont dénués de valeur sociale dans une société civilisée qui respecte les droits de l’homme ». Pourtant l’aspect “barbare” du MMA est avant tout symbolique, la cage est faite pour protéger les combattants afin qu’ils ne soient pas éjectés du ring et les coups au sol sont moins dangereux que des coups debout. Il y a aussi moins de commotions cérébrales qu’en boxe anglaise par exemple, dont les règles laissent 10 secondes aux combattants pour se relever après une mise au sol, ce qui accentue les chances de reprendre des coups et ainsi subir de lourds dégâts au cerveau.
La France, pionnière malgré l’interdiction ?
Malgré l’interdiction, de nombreux français ont, dès les années 90, tentés leur chance avec plus ou moins de succès dans la discipline. Devenus pour certains des grands noms a l’étranger, leur popularité en France n’a pas su se développer du fait de l’absence de médiatisation. À l’instar d’un Jérome Le Banner (Kickboxeur) ou d’un Tony Yoka (Boxeur) par exemple, pour qui les disciplines sportives sont acceptées depuis longtemps. Ces français arrivés 10, voire 20 ans trop tôt, ont pourtant fait la fierté du pays à l’international. C’est le cas par exemple de Kristof Midoux, premier français à avoir combattu à l’UFC puis entraîneur de la légende québécoise, aussi considéré par beaucoup comme le GOAT
(Greatest of all time) de la discipline : George Saint-Pierre. D’autres français ont suivi comme Cheick Kongo et son retournement de situation légendaire face a l’américain Pat Barry. On peut citer Cyrille Diabaté, ayant affronté l’un des plus grands noms du MMA Alexander Gustafsson, ou encore Daniel Woirin, entraîneur de pied-poings ayant coaché la légende brésilienne Anderson Silva.
La France commençait déjà à se créer une réputation dès les années 90 malgré les bâtons dans les roues des gouvernements de l’époque. Le fait qu’ils aient été forcés de se rendre à l’étranger pour combattre a eu pour conséquence que beaucoup d’entre eux ont servi de faire-valoir pour les combattants locaux. Malgré un environnement hostile, ces pionniers du MMA français ont pavé la route des combattants actuels qui ont désormais l’opportunité d’évoluer dans leur pays et de se former dans un circuit amateur très développé. Cette formalisation, on la doit en grande partie à Bertrand Amoussou, ancien combattant du Pride et frère de l’ancien champion du Bellator Karl Amoussou. Ce dernier avait d’ailleurs manifesté son mécontentement face à la situation en France en décidant de représenter l’Allemagne, sa deuxième nationalité. Par la suite, il a mené un long travail de création d’un règlement qui respecte à la fois la liberté qu’offre le MMA mais aussi le degré de sécurité souhaitée par les autorités françaises.
MMA : sport star des réseaux sociaux
La popularité médiatique actuelle du MMA en France est flagrante notamment sur les réseaux sociaux. @GregMMA, de son vrai nom Grégory Bouchelaghem, ancien combattant du Pride, fait désormais partie de la culture populaire de l’Internet français. Pour Karaté Bushido, magazine historique des sports de combat et des arts martiaux dans l’hexagone, il publie régulièrement des vidéos dans lesquelles il affronte les prodiges ou les espoirs français.
Il réalise également d’autres formats plus divertissants, en testant des personnes prises au hasard dans la rue. Chacune de ses publications tourne autour du million de vue, ce qui témoigne de l’engouement et de la fascination pour ce sport. Le nombre de médias indépendants a lui aussi explosé : La Sueur, Laser MMA, AB Show ou encore MMA Propagande. Ce sont des relais très importants qui permettent à l’écosystème de cette pratique de se populariser.
Le premier français à avoir médiatisé le MMA auprès du grand public est Morgan Charrière. Ancien champion du Cage Warriors, il a su se créer une grande popularité sur les réseaux sociaux, notamment en collaborant avec le streamer de jeux-vidéos Kameto. Sa notoriété et l’engagement de ses followers sont tels, que M6 fut la première chaîne nationale a proposé du MMA via sa plateforme en ligne 6Play.
La France : next big thing du MMA ?
Mais si un nom devrait être cité pour son travail depuis maintenant quelques années, c’est celui de Fernand Lopez. Coach de Ciryl Gane, Nassourdine Imavov et anciennement de Francis N’Gannou, cette personnalité est très clivante dans le milieu de part ses partis pris. La raison pour laquelle son nom revient si souvent, c’est son succès et les milliers de nouveaux passionnés que cela a engendré. Propriétaire de la MMA Factory, la plus grande salle d’entraînement de France, et de Management Factory, structure d’accompagnement des athlètes pour gérer leur carrière et leur image, mais surtout de l’Ares Fighting Championship, la plus grande organisation de gala de MMA en France.
Ces différentes étapes menées par ces piliers de la discipline ont permis la tenue de l’UFC Paris, qui a eu lieu le 3 septembre dernier. Cet évènement qui se renouvellera désormais tout les ans fut un succès au retentissement mondial, notamment grâce à l’ambiance durant les combats. L’avenir du MMA français semble radieux, Ciryl Gane est sur le point d’affronter Jon Jones, l’un des plus grands combattants de tous les temps et Mansour Barnaoui est en lice pour le tournoi à 1 million de dollars du Bellator, au cours duquel il peut remporter la ceinture des poids légers. Tout cela montre aux fans du monde entier que la France est le prochain pays sur lequel il faut compter.