On commence tout juste à (re)connaître la charge mentale des femmes qui doivent mener de front vie professionnelle et personnelle avec toutes les inégalités de genre qui vont avec. Mais alors quelle est cette nouvelle forme de charge mentale que dénoncent les femmes sur les réseaux sociaux ?
On pourrait définir la charge mentale maternelle comme l’ensemble des préjugés, des remarques, des pressions ou des jugements que subissent les femmes sur le sujet bien précis de la maternité. Toutes les femmes vont, au moins une fois au cours de leur vie, être confrontées à des remarques liées à la maternité. Que cela soit parce qu’une femme n’a pas encore d’enfant passé un certain âge, qu’elle dise qu’elle n’en veut pas du tout, qu’elle décide de ne pas allaiter ou encore qu’elle expose son enfant sur son profil Facebook, il y aura toujours quelqu’un pour lui dire qu’elle n’est pas « normale » ou qu’elle n’est pas une bonne mère. Cette pression de la société, et souvent des proches des intéressées, est souvent minimisée et même tabou. Mais cette problématique tend à évoluer et les femmes commencent à libérer la parole, notamment sur le réseau social Instagram.
« Bordel de mères » : le compte Instagram qui brise les tabous
Pour lutter contre cette pression de la maternité, ancrée dans les mentalités dès le plus jeune âge des enfants, et particulièrement des petites filles, la journaliste et auteure Fiona Schmidt a lancé en avril2019 le compte Instagram « Bordel de mères ». Un compte qui parle ouvertement de la charge mentale maternelle en recoupant des centaines de témoignages de femmes. Un lieu d’échange, de partage et d’entraide où les femmes se sentent libres d’exprimer ce qu’elles ressentent ou de pousser un coup de gueule en partageant un exemple de pression subie.En quelques jours seulement, la créatrice du compte a reçu des centaines de témoignages, confortant la triste réalité que cette charge mentale maternelle pèse sur beaucoup de femmes.
Sur ce compte, il n’y a pas de tabou, tous les sujets liés à la maternité sont évoqués : le désir ou le non désir d’avoir des enfants, la divergence d’avis au sein du couple, la manière d’éduquer ses enfants, les remarques quotidiennes, les problèmes de santé empêchant d’avoir un enfant, la discrimination dans le milieu professionnel, la peur de certaines femmes qui ne ressentent pas « l’instinct maternel »,l’avortement, la pression des proches, les fausses couches, les grossesses ou les accouchements compliqués, l’adoption ou encore la perte d’un enfant. Tous les sujets sont les bienvenus. Ce compte est un vrai concentré de solidarité et de courage. Chaque témoignage est en fait le reflet de la vie de beaucoup d’autres femmes. Fiona Schmidt reçoit d’ailleurs quotidiennement des messages de remerciement pour avoir mis en lumière des sujets traditionnellement tabous. La parole reste cependant presque exclusivement féminine, la société considérant depuis toujours que la maternité est uniquement un problème de femmes.
Comment des commentaires peuvent détruire psychologiquement
Ces derniers temps, de plus en plus de femmes osent prendre la parole et partager leurs expériences dans les médias ou sur les réseaux sociaux, à travers des comptes comme celui de Fiona Schmidt«Bordel de mères», par exemple.Parmi elles, on retrouve de plus en plus de personnalités ou influenceuses qui parviennent à mettre en lumière ce sujet encore tabou. Le 14 novembre dernier,l’influenceuse Gabrielle Caunesil (@gabriellecaunesil sur Instagram) qui compte plus d’un million d’abonnés, a partagé une photo différente des autres de son profil.
On peut voir la jeune femme démaquillée, en sweat, sur son canapé avec une bouillotte sur le ventre.En légende, Gabrielle explique que cela fait plus d’un an qu’elle reçoit, tous les jours, sous chacune de ses photos postées, des messages lui demandant quand compte-elle avoir un enfant. Elle se rappelle d’une publication postée en avril, période durant laquelle la jeune femme avait pris un peu de poids.Cette publication a littéralement enflammé sa communauté qui a commenté en masse pensant qu’elle était enceinte. L’influenceuse a même du publier un message affirmant le contraire. Toutes ces questions deviennent insupportables pour elle qui désire un enfant plus que tout mais qui a appris à voir des problèmes de santé rendant la conception d’un enfant très compliquée. La jeune femme demande à travers cette photo sans filtre d’arrêter de poser ces questions qui ne font qu’empirer sa souffrance psychologique, mais aussi la souffrance de toutes les autres femmes qui ne peuvent pas avoir d’enfant, qui ne veulent pas avoir d’enfant ou qui ne se sentent pas encore prêtes.
Quand tu n’es pas capable de concevoir ou que tu n’as pas envie de concevoir, c’est que t’as un problème, c’est que tu n’es pas une femme avec un grand F
Gabrielle Caunesil, vidéo « Briser les tabous de l’infertilité féminine » pour Konbini, 14/11/2020
Le même jour, le média Konbini poste une interview vidéo de la jeune femme intitulée « Briser le tabou de l’infertilité féminine ». L’influenceuse y explique, très émue, que la pression autour de la maternité est extrêmement importante chez les femmes et qu’elle peut être très difficile à gérer en fonction de la situation de chacune. Même si les questions partent, la plupart du temps, d’un bon sentiment, elles peuvent finir par être destructrices pour la personne qui les lit quotidiennement. Le fait que certaines femmes, comme Gabrielle Caunesil, osent prendre la parole publiquement sur ce sujet permet d’enlever un voile sur la maternité et d’encourager d’autres femmes à partager leur expérience, à avoir du soutien, à réaliser qu’elles ne sont pas seules.
Article rédigé par Emma Prunel.