Dès le plus jeune âge, on apprend aux jeunes filles à « jouer à la maman », on leur demande combien elles voudront d’enfants plus tard ou encore comment elles les appelleront. Comme si devenir mère allait de soi, comme s’il n’y avait pas d’autre choix. Certaines femmes font cet autre choix et en subissent les conséquences au quotidien.
Quelle petite fille n’a jamais joué à la poupée, promenant son bébé fictif en poussette, s’occupant de lui et jouant avec comme un vrai ? Dès leurs premières années de vie, les petites filles grandissent avec l’image qu’un jour, quand elles seront grandes, elles seront mamans. La maternité leur est présentée comme quelque chose d’évident, une étape par laquelle toute femme passe, une sorte de but ultime. Comme si une femme s’accomplissait réellement en tant que femme qu’après avoir donné la vie. Cette idée, diffusée inconsciemment dans la tête de tous les enfants, est fortement ancrée dans les mentalités. Ajoutez à cela les schémas familiaux traditionnels du siècle dernier, c’est comme si les femmes n’avaient pas d’autres choix que de devenir maman un jour ou l’autre.
Mais contrairement aux générations précédentes,les femmes ne tombent plus enceintes aussi jeunes qu’avant. Il est facile d’expliquer ce décalage par les changements de la société.Aujourd’hui, les femmes font des études et même de plus en plus d’études longues. Elles ont également des postes à plus hautes responsabilités. Un grand nombre de femmes considère la réussite professionnelle comme une source d’épanouissement et d’accomplissement.Ces changements amènent donc les femmes à faire des enfants plus tard, une fois leur situation professionnelle stable ou les objectifs professionnels atteints. L’âge auquel les femmes peuvent avoir des enfants ne s’étant pas décalé pour autant, les femmes gardent constamment en tête le tic tac de la fameuse horloge biologique.
Les femmes face à la pression de la maternité
Qu’importe la raison qui pousse une femme à ne pas être maman, que ce soit pour privilégier sa carrière professionnelle, parce qu’elle ne se sent pas prête, par soucis de santé ou tout simplement parce qu’elle n’en veut pas, elle sera mise sous pression. Chaque tranche d’âge possède son lot de remarques. Quand une femme dit ne pas vouloir d’enfants à 20 ans, on lui répond qu’elle changera d’avis plus tard. Quand une femme n’a pas d’enfant à 28 ans, on lui demande « Alors c’est pour bientôt ? ». Passé 30 ans, on lui dit « Attention, l’horloge tourne, après il sera trop tard ». Et quand une femme dit ne pas vouloir d’enfant à 40 ans, on lui répond qu’elle est égoïste. Toutes ces remarques peuvent paraître sans grande importance mais elles peuvent être destructrices pour beaucoup de femmes. Il est rare que l’on s’épanche sur ses problèmes d’infertilité quand on croise une connaissance dans la rue ou sur le palier. Il est rare que l’on raconte les fausses couches subies qui détruisent psychologiquement et font perdre espoir. Même chose pour la fameuse question « Et le deuxième alors, c’est pour quand ? ». Il est rare que l’on raconte le traumatisme de sa grossesse ou de son premier accouchement qui empêche de recommencer. Il y a des dizaines de raisons qui poussent une femme à ne pas tomber enceinte. Et non, ce n’est pas parce que votre amie ne boit pas d’alcool à votre dîner ou qu’elle a un petit ventre qu’elle vous cache un « heureux évènement ».
Les femmes qui ne désirent pas avoir d’enfant ont, elles aussi, leur lot de remarques insistantes.D’après une enquête réalisée par l’Institut National d’Études Démographiques en 2012, 5% des femmes disent ouvertement ne pas vouloir d’enfant. Ce choix, généralement incompris, est mal vu parla société. Les gens trouvent cette décision suspecte, louche ou même égoïste.Pour ces femmes,avoir un enfant ou non est un choix personnel et un droit qu’elles ne devraient pas avoir à justifier constamment. Une fois ce choix exprimé publiquement, il est très difficile d’éviter les remarques. « Le jugement est quelque chose avec laquelle il faut apprendre à vivre », explique dans Marie Claire, Laëtitia, 33 ans, sans enfant.
La maternité, sujet tabou dans le monde professionnel
Parce que ne pas vouloir d’enfant dérange, en vouloir (ou en avoir) pose aussi problème,particulièrement dans le monde professionnel. D’après un sondage américain réalisé par Modern Family 201 en 2018, 21% des femmes ont peur d’annoncer leur grossesse à leur hiérarchie. Cette pression se ressent aussi lors des entretiens d’embauche. En France, s’il est interdit de demander à une femme si elle prévoit d’avoir des enfants dans les prochaines années, certains recruteurs trouvent le moyen de contourner la question pour obtenir l’information. Certaines femmes avouent avoir menti sur leurs projets futurs lors d’entretiens d’embauche pour avoir une chance d’obtenir le poste convoité. Le retour au travail après un congé maternité est, lui aussi, sujet au jugement. Les femmes qui souhaitent retourner travailler rapidement se sentent coupables et reçoivent des remarques telles que « Tu reprends déjà ? », « Tu vas laisser ton enfant si jeune ? », « Tu vas arrêter de l’allaiter alors ? ». Autant de réflexions qui font culpabiliser les jeunes mères qui souhaitent simplement allier leur vie personnelle et professionnelle.
La pression autour de la maternité n’est pas nouvelle mais la parole autour de ce sujet tend à se libérer doucement. Les idées reçues sur l’épanouissement des femmes à travers la grossesse restent très ancrées dans les mentalités. Les jugements sur leurs choix de vie parfois oppressants.Et parce que ce n’est pas tout d’avoir la pression d’être mère, il y a la pression d’être une bonne mère.
Article rédigé par Emma Prunel.