PAR ÉLODIE FERRO
La Belgique a récemment mis en place le permis de détention d’un animal de compagnie. Pour adopter, il est désormais obligatoire de présenter ce permis, qui peut être retiré en cas d’accusation de maltraitance animale. Face à un taux d’abandon croissant, la question de la mise en place d’un permis similaire en France se pose.
Le 1er janvier 2022, le permis de détention d’un animal de compagnie est entré en vigueur en Belgique. Instauré en 2019 par le Code wallon du Bien-être des animaux, le permis de détention était jusqu’alors obtenu automatiquement par toute personne possédant un animal de compagnie. Ce permis pouvait être retiré aux propriétaires accusés de maltraitance animale, et ainsi les empêcher de pouvoir adopter à nouveau.
Cette mesure, qui était jusqu’alors en période d’adaptation, est désormais officialisée en Belgique. Tous les propriétaires d’animaux de compagnie sont désormais dans l’obligation d’être en possession de ce permis.
Mais l’entrée en vigueur officielle de ce permis de détention en Belgique n’implique pas uniquement la possession obligatoire de ce permis. Elle renforce également les conditions d’adoption d’animaux. En effet, les personnes souhaitant acquérir un nouvel animal doivent désormais présenter un extrait du fichier central de la délinquance environnementale et du bien-être animal – que l’adoption se fasse dans un refuge, un commerce ou un élevage. Cet extrait, semblable à un casier judiciaire de la maltraitance animale, est un document délivré par la commune afin d’attester que le futur propriétaire n’est pas interdit de détention d’animaux de compagnie et que son permis de détention ne lui a pas été retiré.
Ce nouveau permis de détention concerne ainsi tous les propriétaires, à l’exception des acquéreurs déclarés qui détiennent des animaux à des fins purement économiques et agricoles. Les autres propriétaires doivent, eux, s’acquitter de leur permis afin d’adopter et/ou conserver leur animal de compagnie. Toutes les races de chiens, chats, chevaux, oiseaux, hamster, souris, poissons, poules, tortues, reptiles, tortues, lapins ou encore chèvres sont concernées.
Chaque propriétaire peut faire la demande de son permis de détention auprès de sa commune. Une fois délivré, celui-ci reste valable un an pour les espèces qui supposent un achat régulier telles que les oiseaux, les poissons, les rongeurs ou les volailles. Pour les autres espèces, la durée du permis est valable 30 jours. Au-delà, un nouvel extrait du fichier central de la commune sera demandé afin de vérifier si le propriétaire n’a pas été signalé entre-temps. Les propriétaires d’animaux accusés de maltraitance animale pourront ainsi se voir retirer leur permis de détention par un juge ou par un fonctionnaire ayant pouvoir de sanction.
La France favorable au permis ?
Les Français sont de plus en plus sensibles à la cause animale. En effet, un sondage réalisé début 2022 par la Fondation 30 millions d’amis et l’Ifop révèle que le bien-être des animaux est considéré comme un thème majeur des Présidentielles pour la plupart des Français. Le baromètre annuel intitulé « Les Français et le bien-être des animaux » indique ainsi que 69% des Français, soit 7 Français sur 10, considèrent que le thème animal est aussi important que l’écologie ou l’économie pour le débat politique des Présidentielles 2022. « Enquêtes après enquêtes, les Français montrent qu’ils sont de plus en plus mobilisés pour la protection des animaux. En mettant le bien- être animal parmi leurs préoccupations majeures pour la Présidentielle, ils demandent aux candidats de faire des propositions ambitieuses et concrètes en la matière » explique Reha Hutin, Présidente de la Fondation 30 Millions d’Amis, sur le site de l’as-
sociation. Parmi les solutions attendues par les Français de la part du gouvernement, la mise en place d’un permis de détention occupe une place particulière. En effet, selon un sondage commandé par Ultra Premium Direct, spécialiste de l’alimentation pour chien et chat, 65% des Français souhaiteraient l’instauration d’un permis de détention d’animaux de compagnie similaire à celui créé en Belgique. « Il faut un permis d’adoption, pour empêcher les gens de prendre les animaux pour des jouets », « Nous devons créer un ministère de la condition animale. Faire appliquer des sanctions, un permis ou retrait à vie d’adoption en cas de maltraitance » ou encore « Détenir un permis d’adoption pour avoir un animal et arrêter les animaux dans les cirques. Je dis oui, les belges ont tout compris » peut-on lire sur Twitter.
Pourtant, si les Français sont nombreux à souhaiter la mise en place d’un permis de détention d’animaux de compagnie, la mesure ne semble pas encore prévue par le gouvernement. Il ne faut cependant pas perdre espoir et constater les avancées sur le sujet telles que la fin progressive des cirques, des manèges à poneys, et de toutes les activités ludiques qui exploitent les animaux de manière abusive. Un premier pas vers ce permis d’adoption a d’ailleurs été mis en place en octobre 2022 avec la création d’un certificat d’engagement lors de l’adoption d’animaux de compagnie. Celui-ci vise à lutter contre les achats compulsifs suivis généralement d’abandons d’animaux. Mais, simple papier à remplir en quelques minutes, ce certificat n’engage pour l’instant aucune sanction, ce qui semble insuffisant pour la France, championne d’Europe en abandons d’animaux.
La France : championne d’Europe de l’abandon
Cette année encore, la SPA a révélé un bilan inquiétant. L’association a annoncé avoir recueilli près de 16 500 animaux à l’échelle nationale, et ce uniquement sur la période estivale de 2022, c’est-à-dire du 1er mai au 31 août.
Un bilan plus lourd encore est donc à supposer sur l’intégralité de l’année 2022. Avec ces chiffres, la France se positionne comme le pays au taux d’abandon d’animaux de compagnie le plus élevé d’Europe. Parmi les animaux recueillis, l’association a pu compter 11 268 chats, 4 302 chiens, 851 NACS (nouveaux animaux de compagnie) et 36 équidés. Si ces chiffres paraissent dramatiques, il faut garder en tête qu’ils restent légèrement moins élevés que ceux des années précédentes. Le record est en effet détenu par l’été 2021, avec 16 884 abandons soit 2,7% de plus. L’été 2020 a ainsi été la période ayant connu le moins d’abandons. Pour cause, des déplacements estivaux limités par les restrictions gouvernementales liées au Covid-19. Alors, faut-il en venir à interdire les vacances pour limiter les abandons ?
Les chiffres croissants sont d’autant plus inquiétants pour la SPA que les refuges sont de plus en plus saturés. Une baisse de 9% des adoptions avait en effet été observée au début de la période estivale 2022, compromettant la capacité d’accueil des refuges pour l’été. L’association a ainsi dû refuser des animaux dès la mi-août. « Si on avait été en capacité de tous les accueillir, l’été aurait sans doute été plus mauvais encore que 2021″, indique Jean-Charles Fombonne, le président de la SPA, à 20 Minutes. Par chance, la situation a pu se réguler grâce à une légère hausse des adoptions durant la période estivale – une augmentation de 1,2 % par rapport à l’année précédente, mais qui reste toujours trop faible en vu du nombre d’animaux abandonnés régulièrement.
La mise en place d’un permis de détention permettrait alors à tous les propriétaires ayant abandonné leur animal de ne pas pouvoir adopter à nouveau. Il serait également possible de surveiller les comportements suspects tels que les adoptions ou achats à répétitions de petites bêtes afin de lutter contre les maltraitances animales.