Par Paul-Elyes Hecham
Pourtant, cet engagement ne se traduit aucunement dans les bilans de performance de l’industrie aérienne. Selon l’Association du transport aérien international, les bénéfices nets du secteur aérien devraient atteindre 9,8 milliards de dollars en 2023, pour le transport de 4,35 milliards de voyageurs, un chiffre qui s’approche du record absolu de 4,54 milliards en 2019. Les constructeurs aéronautiques prévoient même de doubler leurs flottes dans les vingt prochaines années.
Après trois années de crise, l’avion revient plus fort que jamais : rien ne semble pouvoir rivaliser avec ce moyen de transport si prisé et pourtant si dévastateur.
Rien, ou presque… Car ce qu’il manque pour initier une véritable diminution du trafic aérien, ça n’est pas l’intention : c’est une alternative. Une grande majorité des voyageurs·euses (64% des Français selon l’étude HERE) serait prête à réduire son usage de l’avion pour des raisons environnementales, à une condition : celle de pouvoir compter sur une alternative fiable, écologique et surtout abordable. Pour répondre à ces critères, un seul candidat en lice : le train. Pourtant, celui-ci peine à concurrencer l’avion. Mais alors, à qui la faute ?
Car ce qu’il manque pour initier une véritable diminution du trafic aérien, ça n’est pas l’intention : c’est une alternative. Une grande majorité des voyageurs·euses (64% des Français selon l’étude HERE) serait prête à réduire son usage de l’avion pour des raisons environnementales, à une condition : celle de pouvoir compter sur une alternative fiable, écologique et surtout abordable. Pour répondre à ces critères, un seul candidat en lice : le train. Pourtant, celui-ci peine à concurrencer l’avion. Mais alors, à qui la faute ?
Un réseau exemplaire
En termes de réseau ferroviaire, l’Europe a de quoi se vanter. Les infrastructures ne manquent pas : avec environ 220 000 kilomètres de chemins de fer, le réseau ferré européen est l’un des plus denses et des plus développés au monde. Il relie toutes les capitales, toutes les grandes villes, et cela sans être restreint par les frontières : il est très facile de transiter en train entre les pays membres de l’Union européenne.

La plupart des pays d’Europe abritent des infrastructures modernes et efficaces. C’est par exemple le cas de la Suisse ou de l’Allemagne, qui possèdent des réseaux interrégionaux très denses et des systèmes d’abonnements mensuels permettant de voyager sur tout le réseau en illimité et à moindre coût. De son côté, la France abrite le second réseau ferroviaire le plus long d’Europe, et un train à grande vitesse parmi les plus rapides au monde.
On ne peut donc pas expliquer le retard du ferroviaire face à l’aérien par un manque d’infrastructures ou de disponibilité, dans une région où le réseau de voies ferrées est l’un des plus développés au monde. Essayons autre chose.
Un moyen de transport économique…
Lorsque l’on parle du train, le prix des trajets est la question qui fâche. Dans un sondage d’avril 2023, le collectif Réseau Action Climat révèle que 40 % des Français·es jugent le train « pas économique par rapport à d’autres moyens de transport ». Parmi eux, 22 % trouvent que les tarifs sont en permanence trop chers. Et ils n’ont pas tort : selon Greenpeace, en Europe, les billets de train sont en moyenne deux fois plus chers que les billets d’avion pour un même trajet.
La volonté d’engagement pour la préservation du climat existe bel et bien chez les voyageurs·euses, mais elle ne surpasse pas celle de la préservation du porte-monnaie. Pour être en phase avec les enjeux écologiques auxquels nous faisons face, le train peut être salvateur, à condition d’adopter un modèle économique réaliste.
En France, alors que le secteur aérien bénéficie d’avantages fiscaux, comme l’absence de taxe sur le kérosène ou des réductions de TVA, le ferroviaire souffre du manque d’investissement de l’État et de droits de péages exorbitants qui se répercutent directement sur le prix des billets. Ces droits de péages sont récoltés par SNCF Réseaux, société anonyme à capitaux publics et filiale de la SNCF.
Le résultat, c’est un secteur ferroviaire à cheval entre public et privé, qui fait fluctuer les prix et les disponibilités en fonction de la demande comme le ferait une entreprise, sans pour autant être complètement ouvert à une concurrence low-cost comme le fait le secteur aérien. Pour que le train puisse devenir une véritable alternative à l’avion et répondre au mieux à l’urgence écologique, il faudra choisir son camp. D’un côté, une privatisation assumée accompagnée du développement d’une offre low-cost. De l’autre, un retour vers un service public très subventionné et aux tarifs fixes et sociaux, à la manière de nos voisins allemands et de leur Pass Rail qui offre un accès illimité au réseau ferroviaire national pour 49 euros par mois.
Finalement, la responsabilité dépasse le simple choix des voyageurs·euses. Tant que le train restera sur un modèle instable et disproportionné, il n’aura aucune chance de rivaliser avec l’avion. La volonté et l’engagement de la population pour le climat doivent être suivis et encouragés par les entreprises et gouvernements.
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