Par Viktoriia Kalinina

L’année 2022 restera gravée dans les annales de l’histoire technologique comme celle où l’intelligence artificielle a franchi un cap révolutionnaire. Le 30 novembre 2022, OpenAI, encore inconnu pour le grand public, a ouvert les portes d’un monde inédit en mettant à disposition son Chat GPT, une IA conversationnelle d’un genre nouveau. 

En l’espace de quelques mois, cette technologie a conquis le cœur de plus de centaine de millions d’utilisateurs, un record jamais enregistré. Ainsi débutait une ère de bouleversements sans précédent, où l’intelligence artificielle semblait prête à prendre une place centrale dans nos vies. Mais, cette révolution annonce-t-elle le début de la fin de notre mode de vie traditionnel ? Explorons donc la nouvelle génération de l’IA.

Quatre cavaliers de l’apocalypse : Chat GPT, DALL-E, Midjourney et Deep Fake

En novembre 2022, OpenAI a rendu son Chat GPT accessible au grand public. Deux mois après cette intelligence artificielle conversationnelle comptait déjà 100 millions d’utilisateurs. À titre de comparaison, il a fallu 9 mois à TikTok, autrefois une plateforme à la croissance flamboyante, pour dépasser cette barre. Ainsi a commencé la Grande Conquête de l’IA de nouvelle génération, qui a à jamais bouleversé nos vies à plusieurs niveaux.

Comment peut-on caractériser cette génération ? C’est simple, ce sont des IA capables de vous remplacer dans votre travail, et bien plus encore. Autrefois, les intelligences artificielles n’arrivaient pas à reproduire la parole humaine, que ce soit sur le plan physique et vocal ou sur le plan psycholinguistique. La sonorité de cette parole était absolument ignoble, dépourvue de la moindre once d’humanité. Et ne parlons même pas d’un schéma que seul notre cerveau humain pouvait reproduire depuis des siècles.

Ce schéma consistait en : 1. Écouter/lire le message, 2. Le déchiffrer, 3. Le comprendre dans son contexte, 4. Réfléchir et trouver une réponse, 5. Pour finalement la prononcer ou la rédiger

 

Pour les IA qui existaient avant l’arrivée de Chat GPT, c’était une tâche de niveau quasi inatteignable. À l’époque, les chat-bots conversationnels étaient plus effrayants que sympathiques, agaçants avec des réponses trop basiques et simples. C’est ainsi que nous nous sentions en sécurité, car nous n’imaginions pas que les algorithmes allaient bientôt dépasser cette capacité de la pensée et la conversation humaine. Les « machines » étaient précises et puissantes pour les calculs, les tâches répétitives et mécaniques… Mais pas pour les dialogues ou des tâches plus créatives comme le dessin et autres…

Puis, un jour, nous avons reçu un programme qui nous parle, et, cette fois, il le fait bien. La nouvelle IA conversationnelle n’a plus cette langue de bois ennuyeuse, elle n’est plus aussi sotte qu’auparavant, ni faible dans ses réponses. Chat GPT est précis, il possède une énorme base de connaissances dans d’innombrables secteurs… Mais surtout, il parle de manière fluide, compréhensible, il saisit le contexte de votre conversation. Il construit sa parole en temps réel, et elle est irréprochable. Désormais, les algorithmes peuvent mener des discussions élaborées avec nous, comme s’il s’agissait d’une vraie personne. 

Cependant, si on essaie de faire passer le test de Turing à Chat GPT, nous pouvons quand même remarquer les détails qui le trahissent. Cette IA imite très bien le langage humain, mais pas l’aspect relationnel humain. Par exemple, dans une vidéo de la chaîne YouTube Jubilee « 6 humans vs 1 Secret AI », la chaîne a organisé une expérience sociale proche d’un test de Turing. Chaque participant séparé des autres par un paravent écrivait des réponses à des questions personnelles pour se présenter. Après 5 questions, les participants ont voté pour choisir qui était l’intelligence artificielle. Et ils l’ont trouvée assez facilement.

Mais il faut l’avouer, Chat GPT imite très bien le langage naturel, particulièrement du registre neutre et sophistiqué. 

À la suite de l’apparition de Chat GPT, la nouvelle génération de l’IA réaffirme son apparition avec les IA génératives d’images comme DALL-E ou encore Midjourney. Il existait déjà des réseaux de neurones capables de générer des images assez réalistes, mais ils n’étaient pas aussi accessibles au grand public. La raison en est simple : ces deux IA génèrent des images à partir des descriptions textuelles que nous leur fournissons. Des images improbables, mais pourtant réalistes (si nous le souhaitons) en haute résolution voient le jour. Plus besoin d’avoir des connaissances ou des compétences exceptionnelles, sauf une : bien formuler sa demande en format texte.

Et c’est parti ! Les intelligences artificielles imitent bien le langage humain et possèdent une base de connaissances très vaste. Les intelligences artificielles sont capables de créer des visuels stylisés en photographies, dessins, tableaux, etc. Elles sont de plus en plus spécialisées pour réaliser des tâches précises : elles créent des diaporamas, des publications sur les réseaux sociaux, des publicités, rédigent les devoirs scolaires, rédigent des rapports, font des rapports… Elles font tout.

IA : Une menace, ou le meilleur des mondes ?

Comment les IA de la nouvelle génération parviennent-elles à faire ce qu’elles font si bien ? Elles l’ont appris grâce à d’énormes bases de données graphiques et textuelles, et nous disposons d’algorithmes capables de reproduire la capacité de réflexion et de création humaine. Cependant, la contribution à ces bases de données était-elle toujours consentie par leurs auteur·rices ? Pas toujours, et c’est l’un des problèmes du nouveau monde des intelligences artificielles. Le web entier a été aspiré pour nourrir ces IA, sans demander son avis à personne. 

Aujourd’hui, nous avons des comptes Instagram d’ »artistes IA » qui se contentent pour la plupart de saisir du texte dans une des IA génératives. Nous avons aussi des vidéos traitées avec un « filtre » IA qui les transforme en dessins animés. Et ensuite, nous avons des citoyens ordinaires qui passent leurs photos à travers une IA pour avoir leur visage transformé en un personnage de dessin animé ou de film fantasy. Pendant ce temps, les véritables artistes numériques traversent des épreuves, ce qui s’observe sans difficulté dans les espaces commentaires.

Ensuite, nous ne faisons plus autant d’efforts pour rédiger des textes. Si nous avons besoin d’un plan pour une présentation orale ou un article, il nous suffit de le demander à l’une de nos IA génératives préférées. Si nous devons rédiger un rapport trimestriel ennuyeux, l’IA nous aide. Un essai de 5 pages sur « La Guerre et La Paix » de Tolstoï qui est à rendre pour le lendemain, mais que nous n’avons évidemment pas lu ? Pas de problème, quelques coups de clavier, et voilà ! Même le mémoire de Master, nous pouvons le rédiger à une vitesse incroyable grâce à Chat GPT.

Plus d’angoisse de la page blanche et ni d’heures consacrées à une réflexion sur chaque détail de notre texte… L’humanité délègue, en quelque sorte, sa capacité à réfléchir, à créer, à bien s’exprimer, etc. L’IA devient une clé passe-partout, et cela peut paraître effrayant.

Certainement, comme toute avancée technologique, la nouvelle génération d’IA va provoquer des changements, tout comme cela se produit déjà. La génération des textes et des images, ainsi que de tout ce qui découle des deux, n’est plus la même. Désormais, rédiger un article de deux pages peut prendre une minute, tandis que réaliser un montage photo avec l’IA d’Adobe Firefly ne prendra guère plus que quelques minutes. 

Source image : Freepik

Si nous plongeons dans le sujet, même si les IA modernes semblent avoir une parole bien élaborée et sophistiquée, presque humaine, et qu’elles sont capables de reproduire des photos, des images et des tableaux d’une qualité jamais vue auparavant… Même avec ces capacités incroyables atteintes par les machines, est-ce la fin de notre vie normale ?

Oui et non.

En effet, le travail de rédaction ou de création graphique est devenu plus accessible à un public plus large. Cela a également grandement simplifié ce genre de travail et l’a rendu plus rapide. Alors, allons-nous remplacer tous ceux qui effectuent normalement ces tâches, par des IA ?  Les emplois qui sont peu créatifs, qui ne demandent pas beaucoup de réflexion humaine ou qui sont très répétitifs risquent de disparaître à l’avenir. En revanche, les métiers qui exigent d’autres compétences humaines sont plus en sécurité pour le moment.

Oui, l’IA peut produire des images qui ressemblent à de l’art ou encore des textes qui passent facilement pour des textes humains. Cependant, elle manque toujours de la qualité relationnelle humaine, de la qualité imaginative, sensible, etc. Et le premier aspect est l’un des plus importants. On pourrait le résumer par cette blague trouvée sur internet : « Tant que le client ne sait pas décrire précisément ce qu’il veut comme résultat, nous sommes tranquilles… Et, un client qui explique bien ses besoins dès le début, ça ne risque pas d’arriver« .

Finalement, nous pouvons très bien utiliser l’IA pour créer des textes, puis les adapter et les enrichir à notre guise. C’est d’ailleurs ce que font de nombreux professionnels de la communication, de l’information et du marketing de nos jours. « L’IA n’est qu’un outil« , proclament-ils, « et le défi d’aujourd’hui consiste à savoir comment l’utiliser pour maximiser votre productivité. »

Face à cette révolution technologique, le choix vous appartient : devenir les architectes du futur ou les spectateur·rices passifs du changement. Quelle voie prendrez-vous ?

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