Par Pierre Dussaucy
Depuis l’incendie tragique de 2019, l’intelligence artificielle (IA) s’impose comme un atout majeur dans la reconstruction de Notre-Dame de Paris. Des entreprises comme Autodesk, en partenariat avec Art Graphique et Patrimoine, ont conçu des modèles numériques détaillés de la cathédrale grâce à des technologies avancées comme le Building Information Modeling (BIM). Ces outils facilitent la planification et la gestion du chantier, optimisant le positionnement des grues et l’organisation logistique des travaux. Hamza, étudiant en deuxième année de Master 3d et animation temps réel, revient sur son parcours singulier et partage sa vision sur l’impact de l’IA dans ce domaine, notamment pour des projets complexes comme la reconstruction de Notre-Dame.
Un parcours atypique entre sciences et création numérique
Hamza a débuté sa carrière académique dans les sciences, avec une licence en biologie ingénierie. Mais malgré des facilités dans les matières scientifiques, il réalise rapidement que ce n’est pas sa vocation. « Ce n’était vraiment pas ce que je voulais faire de ma vie et je ne me sentais pas à ma place », confie-t-il.
Passionné de dessin depuis l’enfance, il décide alors de se réorienter vers une voie créative. Il intègre une licence en design 3D et animation à l’ICAN, une école spécialisée dans le multimédia et le design, puis poursuit avec un master en 3D temps réel. Aujourd’hui en alternance chez MBDA, une grande entreprise française de défense, il travaille sur des projets d’infographie 3D.
L’IA, un outil révolutionnaire pour la modélisation 3D
Pour Hamza, l’IA apporte des changements radicaux au processus de modélisation 3D. « Le système de workflow est totalement différent quand on utilise l’IA dans son travail de modélisation », explique-t-il.
Il cite deux outils qu’il a déjà expérimentés : Rokoko Vision et Hyper3D.ai. « Rokoko, c’est une IA qui aide à l’animation d’un personnage et de son rig. Tu te filmes avec ton téléphone en faisant une chorégraphie, et elle te sort une animation rough, voire de qualité correcte, directement appliquée à ton personnage 3D. ».
Quant à Hyper3D.ai, il s’agit d’une véritable prouesse technologique. « Avec une simple photo, l’IA te donne une modélisation complète d’un objet ou d’un personnage avec sa texture. C’est incroyable. ». Ces outils lui permettent d’accélérer considérablement son processus de création. « Ça m’apporte de la rapidité dans ma production. Grâce à l’IA, j’avance plus vite. ».
L’avenir de la 3D et l’accessibilité à tous
Hamza imagine un avenir où l’IA jouera un rôle encore plus central dans la modélisation 3D. « Dans un premier temps, elle apportera un énorme gain de rapidité. Mais à terme, l’IA pourrait rendre notre travail accessible à tous, sans difficulté. ».
Ce scénario suscite des interrogations. Si l’IA permet à quiconque de produire des modèles 3D de qualité professionnelle, quel sera l’impact sur les artistes et les créateurs ? « Avec le temps, l’IA pourrait même remplacer notre travail » anticipe-t-il, tout en soulignant que l’humain garde pour l’instant l’avantage en matière de créativité.
Recréer Notre-Dame grâce à l’IA : un apport idéal
L’utilisation de l’IA pour des projets ambitieux comme la reconstruction de Notre-Dame illustre parfaitement son potentiel. Hamza mentionne notamment Nvidia Omniverse, un logiciel novateur qui intègre des fonctionnalités IA. « Avec Omniverse, tu peux créer tout un environnement 3D en un clic. Je ne l’ai pas encore testé, mais j’imagine qu’il pourrait être utilisé pour recréer les réparations ou concevoir les futures structures de Notre-Dame très facilement. ».
Pour des projets d’une telle envergure, l’IA peut combiner précision, technique et rapidité, tout en s’appuyant sur des données historiques et des scans. Hamza cependant reste convaincu que l’intervention humaine demeure essentielle pour préserver l’authenticité et l’intégrité des créations.
Les dérives possibles : quand l’IA menace l’art
Malgré ses avantages, l’IA pose aussi des questions éthiques et des risques pour les métiers créatifs. « L’IA est un risque pour l’art. Elle peut violer les droits d’auteurs et, si les productions en deviennent exclusivement dépendantes, plus personne n’embauchera d’artistes », alerte Hamza.
Pour lui, la principale limite de l’IA est son incapacité à créer. « L’IA sait parfaitement copier, mais elle ne sait pas créer. L’humain peut. ». Il souligne que la dépendance excessive à l’IA pourrait nuire à la diversité et à l’innovation artistique, mettant ainsi en péril l’essence même de la création.
Un futur hybride entre technologie et créativité humaine
Hamza conclut en affirmant que l’IA, bien qu’impressionnante, doit rester un outil complémentaire. « Ce qui compte, c’est la vision de l’artiste. L’IA peut aider à aller plus loin, mais elle ne remplacera jamais la sensibilité et la créativité humaines. ».
À travers son expérience et ses réflexions, il incarne cette génération de créateurs qui jonglent entre art et technologie. Alors que l’IA s’impose dans le secteur, des questions fondamentales sur son impact, ses limites et ses opportunités restent ouvertes. Une chose est sûre : l’avenir de la modélisation 3D sera résolument hybride, mêlant la précision algorithmique à la profondeur de l’imaginaire humain.
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